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La même en vrai
18 janvier 2007

Epitaphe

Voilà, j'entame ma dernière nuit de femme enceinte.

A minuit j'éteindrai ma dernière cigarette, pour être ajeun à 8h. A minuit, ce sera déjà le 19. Le "Game Over".

Aujourd'hui j'ai acheté les pilules prescrites par le médecin du planning, et j'ai acheté des serviettes "spéciales Maternité", quelle ironie du sort... De toutes façons, c'est bien à la maternité que je vais demain. Et c'est bien un obstétricien qui va m'aspirer. Alors c'est un peu la même chose...en pire (sourire dépité).

Je n'ai plus envie d'écrire, pas encore envie de fermer cette page. Pas encore envie de ne plus être enceinte.

Je sais bien que c'est impossible. Je sais qu'on n'a pas l'argent nécessaire, pas le passé commun nécessaire, je sais qu'il nous faut d'abord écrire une vie à nous, à nous 5. Mais ce bébé, je ne l'ai pas voulu, et pourtant il est là. Mes enfants, je les ai voulus, et puis je suis tout naturellement tombée enceinte ensuite. Je me disais que je n'aurais surtout pas désiré qu'il en fût autrement. Que c'était comme ça que je voulais devenir mère. Pourtant c'est dingue, je suis émue de cette situation. Je suis émue de porter un enfant que je n'ai pas consiemment désiré, que je n'ai pas attendu, guetté. Je suis émue de porter un enfant qui s'est imposé seul au milieu du tourbillon de nos vies, sans faire cas des contraintes et des conséquences. Oui, je sais. C'est stupide de parler ainsi. Surtout maintenant, surtout ce soir. Puisque le chemin est tout tracé, je me contenterai de le suivre.

Mais je crois que je garderai la petite ombre du regret. Parce que moi je ne suis plus assez innocente pour me moquer des contraintes et des conséquences. Alors tant pis. Je jouerai la carte de la patience et de l'oubli, cette carte qui m'est insupportable tant elle m'est familière, cette carte que je joue presque à chaque coup depuis ma plus tendre enfance. La patience, l'oubli.

J'écris sans trop savoir pourquoi, en fait je n'écris que des banalités. C'est juste que Boris travaille ce soir, et que j'ai pas envie de laisser ici une page blanche. C'est quand même une soirée importante, j'voudrais en laisser une marque quelque part...alors ici...c'est bien...c'est pas trop exposé aux regards, mais suffisamment pour m'aider à prendre du recul.

Demain matin je dépose les enfants à la garderie, la journée va être longue pour eux, je culpabilise d'autant plus qu'ils sentent bien qu'il se trame quelque chose...derrière. Pendant 48 heures je n'aurai pas le droit de rester seule. Surveillance continue de Boris prescrite par le médecin, en cas d'hémorragie.

Bon, là vraiment je ne sais plus quoi dire. Je vais aller bouquiner un peu... "Je te retrouverai", le dernier John Irving. Et puis si j'ai le temps, je viendrai dire un mot demain matin au réveil, quand j'avalerai les deux comprimés de Cytotec. Et mes rêves idiots avec.

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